par Aspera » Lundi 31 Juillet 2017 22:42
Bonjour à tous,
J’ai perdu ma petite minette de 14 ans samedi dernier, et le deuil est très éprouvant pour moi… Je ne connaissais pas ce forum mais je ressens le besoin d’écrire et d’échanger pour essayer de surmonter cette épreuve. Je remercie donc ceux qui me liront, ça risque d’être long…
Lorsque j’ai accueilli Chamwek (je sais, drôle de nom !) chez moi, j’avais 20 ans et elle avait quelques mois. Depuis, elle m’a accompagnée partout, au gré de mes déménagements. Nous avons vécu quelques années en collocation avec des amis, mais la plupart du temps, c’était juste elle et moi. J’avais le sentiment qu’on formait une équipe. Vous connaissez sans doute tous ce sentiment d’avoir l’impression de pouvoir « lire » le comportement de votre chat : connaître ses habitudes, savoir ce que signifie tel miaulement, tel regard, tel geste. Parfois ça devient presque une chorégraphie : je m’allonge sur le côté, je te regarde, tu montes sur le lit, je tapote la place devant moi, tu viens te blottir dans mes bras. Je sais où tu vas poser tes pattes, je sais à quel moment tu vas commencer à ronronner, je sais que si j’approche mon visage de toi tu frotteras ta tête contre la mienne. Ce n’est pas une science exacte, mais nous avions appris à nous apprivoiser l’une l’autre, à connaître tous ces détails qui rendent fluide et douce la vie en commun. C’était une minette craintive, qui avait peur d’approcher des inconnus, mais très câline avec moi. Je ne sais pas si ce que ressentent les chats peut être appelé de l’amour, mais en tout cas je sais qu’elle me faisait confiance, et c’était un sentiment très précieux pour moi.
Il y a quatre ans de ça, elle a perdu l’appétit et a commencé à maigrir. On lui a diagnostiqué une insuffisance rénale avec des analyses très mauvaises. Les taux concernés étant particulièrement élevés, mon vétérinaire m’a prévenue qu’elle risquait de ne tenir que quelques mois. J’étais effondrée, mais je n’ai pas voulu renoncer et les soins ont commencé. Heureusement, ma minette a doucement repris du poids, et a mené une belle vie de chat pendant encore 4 ans, malgré les médicaments, l’appétit fluctuant, les perfusions à la maison pour la réhydrater régulièrement… Tous les vétérinaires que j’ai vus m’ont dit que ça relevait du miracle, et j’ai moi-même pris ces années comme un beau bonus, en en profitant au maximum. Depuis cet automne, elle a recommencé à maigrir régulièrement. J’ai fait tout ce que j’ai pu pour qu’elle vive sans souffrance le plus longtemps possible, et même si sa santé déclinait ces dernières semaines, mardi dernier encore, elle chassait une mouche sur mon lit (trop pas douée pour les oiseaux !).
La maladie a quand même fini par l’emporter… j’ai eu le temps de m’y préparer, mais le vide laissé par son absence est terrible. Pour l’instant, je n’arrive plus à vivre normalement. Chaque chose déjà vécue me rappelle que je l’ai vécue avec elle, et chaque chose nouvelle me rappelle ce qu’elle n’est plus là pour la partager avec moi. Je ne verrai plus jamais ses grands yeux jaunes, je n’entendrai plus jamais son petit miaulement quand je pose ma main sur la couette sous laquelle elle dort, je ne sentirai plus sa douceur contre moi, et c’est comme si le monde n’était plus normal. Ca peut avoir l’air excessif aux yeux de beaucoup de gens, mais je crois qu’ici, vous me comprendrez.
Et puis en plus de cette douleur de la séparation, il y a la culpabilité… Je suis en vacances depuis un mois, et j’avais prévu de partir quelques jours voir des amis, mais comme Chamwek n’était pas très bien et sortait d’une hospitalisation début juillet, je n’ai pas voulu la laisser à quelqu’un d’autre et j’ai passé ces dernières semaines chez moi avec elle. Seulement la semaine dernière, j’ai voulu partir chez mes parents qui vivent à 200km. Même s’il y a toujours un petit temps d’adaptation, elle connaît leur maison où elle va plusieurs fois par an depuis qu’elle est toute petite. Comme je pars en voyage mi-août pour 4 jours, je savais qu’à un moment ou l’autre il faudrait que je la leur amène pour qu’ils la gardent en mon absence. Je dois avouer aussi que je saturais d’être bloquée chez moi… Et puis mes parents ont un jardin beaucoup plus grand que le mien, et leur maison est plus fraîche, donc j‘espérais que peut-être la minette serait mieux là-bas pour terminer ses jours tranquillement. Bref, j’avais prévu de partir jeudi, mais mercredi soir elle a montré des signes de faiblesse plus importants : elle mangeait et sortait encore un peu mais restait surtout allongée et avait du mal à faire plus de quelques pas à la fois sans se coucher sur le sol. J’ai beaucoup hésité à partir, mais finalement je l’ai fait quand même. Je me disais qu’il valait mieux le faire tant que son état n’était pas encore catastrophique, que le trajet serait sûrement un moment désagréable pour elle mais qu’une fois sur place elle serait mieux… Le voyage a effectivement été vraiment difficile, elle a miaulé tout le long (ce qu’elle fait beaucoup moins d’habitude, même si ça l’a toujours stressée et qu’elle a toujours eu besoin d’un petit moment pour s’en remettre). Une fois arrivées sur place elle était encore plus faible et ne s’approchait plus trop de moi. Elle a passé les deux jours suivants couchée, peu réactive, en se déplaçant régulièrement d’un endroit à l’autre pour se poser. Elle a continué à aller à sa litière, à sortir et à manger un peu, mais comme elle ne tenait pas longtemps assise ni debout, je l’ai nourrie à la main avec les choses qu’elle préfère (charcuterie mon amour). J’ai essayé de la porter pour l’aider à boire, à se déplacer, je l’ai caressée doucement, mais elle n’avait pas tellement envie que je la touche, alors je ne sais pas si ce n’était pas pire que mieux finalement.
Enfin, samedi à l’aube, quand je suis allée vers la porte de la maison, elle est sortie tout de suite. J’ai passé 3h pas trop loin d’elle dans le jardin à écouter le jour se lever. Elle était couchée sur le flanc, dans l’herbe et de temps en temps faisait quelques pas pour changer d’endroit. Je ne sais pas exactement ce qu’elle percevait de ce qui se passait autour d’elle, si elle en a profité un peu, car elle n’a pas vraiment réagi par exemple quand un écureuil est passé devant elle. Puis je l’ai prise dans mes bras, je l’ai couchée sur mes genoux dans la voiture et ma mère nous a amenées chez la vétérinaire… elle l’a examinée et m’a dit qu’elle était en hypothermie, très fatiguée, et qu’elle avait sans doute un souci cardiaque car même la respiration lui demandait un effort… alors nous avons décidé d’arrêter là. J’ai glissé ma main sous sa tête, et je l’ai caressée en lui parlant tout doucement pendant que l’anesthésie faisait effet. Quand la vétérinaire m’a dit qu’elle était endormie, je lui ai demandé si elle percevait encore ce qui se passait autour d’elle, et elle m’a dit que non. J’ai hésité à rester, mais je suis sortie de la pièce avant qu’elle lui fasse la dernière injection. J’ai récupéré ma petite minette et je l’ai enterrée au milieu des arbres dans le jardin de mes parents, puis j’ai planté des fleurs sur sa tombe.
Aujourd’hui je me sens coupable car je me dis que je n’aurais jamais dû partir en voyage avec elle alors qu’elle était si faible… Je croyais, ou je voulais croire qu’elle pourrait se remettre du voyage et avoir encore quelques bonnes journées ou semaines, mais ça n’a pas été le cas. Elle serait partie de toute façon, vu son état c’était une question de jours, donc je ne me reproche pas son décès… mais j’ai le sentiment qu’avec ce trajet, je lui ai ajouté du stress et de la souffrance qui auraient pu être évités si elle avait fini ses jours tranquillement dans sa maison. Comme si au lieu de la soulager au moment où elle en avait le plus besoin, j’avais empiré les choses… Je ne pouvais pas savoir avec certitude comment ça se passerait, mais le résultat est le même, et je m’en veux énormément. Je regrette aussi d’être sortie après l’anesthésie, de ne pas être restée avec elle jusqu’à son dernier souffle. Pour moi déjà, et aussi parce qu’après coup j’ai lu des articles disant que dans certains cas (rares mais qui existent), des gens sous anesthésie générale perçoivent certaines choses qui se passent autour d’eux. J’espère très fort que ma minette n’a pas senti avant de mourir, même vaguement, que je l’avais laissée seule avec une inconnue, mais je ne pourrai jamais en être sûre à 100%, et ça me ronge…Tout ça fait que malgré les années où je me suis accrochée pour elle et où je l’ai aimée de toutes mes forces, j’ai l’impression de lui avoir fait défaut, de ne pas avoir été à la hauteur dans ses derniers moments…
Voilà, je suis désolée d’avoir été si longue, je n’ai pas trouvé d’autre moyen pour essayer d’apaiser la souffrance que de vous raconter tout ça. Merci encore de m’avoir lue.