par Nyah » Mardi 08 Octobre 2013 9:31
Je voudrai par ailleurs faire quelques remarques sur les commentaires que je lis ici et là. Je m’étonne que certains éleveurs fassent leurs activités en sachant qu’ils seront en déficit structurelle. Soit c’est qu’ils ont mal calibré leur budget, soit c'est qu’ils vendent leur chat à perte. Je fais bien le distinguo entre « vente à perte » et « vente à faible marge ». Vendre un chaton à moins de 850€ aujourd’hui (au regard de l’ensemble des frais qu’il demande) c’est vendre à perte (dans la grande majorité des cas au regard des frais engendrées). Dans ces conditions, pas étonnant que ces éleveurs aient du mal à boucler le budget de leur exploitation. L’éleveur professionnel étant un agriculteur, il est normal qu’il ait des revenus qui lui permettent de dégager un peu de bénéfice notamment pour lui permettre d’investir pour continuer son activité. Celà n'enlève rien à la passion que l'éleveur a envers ses chats, et l'implication personnel qu'il investi dans son exploitation.
Le chat de race est un chat qui coûte plus cher que celui vendu sur « le bon coin », oui mais vous avez aussi mis votre savoir faire d’éleveur pour pouvoir garantir à vos clients un chaton de qualité, socialisé et en bonne santé. Il ne faut pas se leurrer, le chat de race est un "produit". Qui nous demande, certes un investissement affectif mais l'objectif de tout éleveur, c'est de ventre son "produit". J'entend déjà les remarques que l'on peut faire au sujet du mot "produit" et du sens péjoratif qu'il peut avoir. Mais au strict sens commerciale, le chaton est bien le "produit" de l'exploitation agricole !
Rien n’interdit en France de vendre des chatons stérilisés à la condition que cela soit explicitement spécifié sur le contrat de vente tout comme rien ne vous interdit de demander à vos clients que ce soit eux qui supportent le prix (sous présentation de la facture du vétérinaire) de la stérilisation qu’au final ils seront à terme obligés de faire.
Je pense qu'il faut aussi faire preuve de pédagogie avec les clients et leur expliquer que le travail d’éleveur n’est pas uniquement (même si c’est la passion qui nous motive) un plaisir mais aussi un investissement de ressource et de temps et qu’il (le client) vous rétribue à sa juste valeur en achetant le chaton (le produit). Je sais bien qu’on s’investit moralement auprès de nos compagnons et que la relation que l’on a avec nos reproducteurs n’a pas la même implication que celle d’un éleveur de vaches Charolaise (et encore…) mais on fait somme toute le même travail !
Quant au durcicement de la législation pour les particuliers, il est vrai que cela serait une bonne chose, mais si un particulier fait une saillie c’est dans la grande majorité des cas parce qu’il a obtenu un chaton non stérilisé. A l’argument « oui mais ça va limiter l’arrivée de nouveaux éleveurs », je réplique par le mot « parrainage » ! Toute personne peut devenir éleveur et mettre sa passion dans son élevage à condition d’avoir un projet solide présenté à un ou des éleveurs. Le parrainage crée un lien positif. A titre personnel, je ne me serais jamais lancé dans l’aventure sans avoir au préalable eu une relation de ce type avec les autres éleveurs sérieux Français et Européen de la race que j’ai choisie. Je leur ai expliqué mon projet et c’est ensemble, avec leur aide, qu’il se monte.
Comme je l’ai déjà indiqué, je pense, qu’il serait bon de se pencher sur certains prix pratiqués par certains acteurs du secteur (Loof, I-cad, vétérinaire), de voir si certaines normes ne pourraient pas, sans incidence sur nos compagnons, être assouplies (vaccination systématique tout les ans par exemple), prix des expositions, etc…C’est à mon avis dans cette direction que l’on pourrait faire infléchir les tendances actuelle qui nous forcent à rogner sur nos marges bénéficiaire et limite nos potentiels d’investissement.
Il est vrai qu'il y a beaucoup de petit élevage et que la concurence est rude, mais ne vaut il pas mieux reflechir aussi au nombre de chats achetés à des prix sacrifiés qui finissent dans les refuges, enthanasiés, voir receuillit pour des expériences de labos ?
Je sais pertinemment, qu'annoncer un prix de 1200-1400€ pour un chat parait exhorbitant, mais pourquoi un chaton de race est vendu à ce prix ?
Voici un texte qui m'avait été passé par un ami éleveur :
Contrairement à l’idée répandue, l’élevage n’est pas un hobby qui ne demande que peux de temps et d’investissement. C’est une activité professionnelle au même titre que l’élevage bovin, ovin, porcin, chevalin et canin. La seule différence majeure avec les trois premiers élevages cités précédemment, c’est que ce type d’élevage s’adresse en majorité à des particuliers et dans de rare cas à des professionnels. En effet, peu de particulier vont eux-mêmes acheter leurs vaches, leurs porcs ou leurs moutons directement chez l’éleveur !
Cette activité professionnelle requiert des compétences acquises par le passage notamment d’un diplôme (le CETAC) et l’obtention d’un certificat d’aptitude délivré par la préfecture. Cette activité est réglementée par des normes décrites dans le code de l’Agriculture au même titre que les différents élevages qualifiés ci-dessus.
Maintenant que cela est rappelé, nous allons pouvoir commencer à expliquer plus en détails la tarification des chatons de compagnie.
Une reproductrice est en théorie capable d’avoir une portée tout les 150 jours environs (5 mois) mais ce n’est guère recommandé pour la santé de la reproductrice. En effet, il faut lui laisser un peu de temps pour que son organisme se repose. C’est pourquoi un intervalle de 8 mois entre chaque saillie est le minimum recommandé. Dans une année de 12 mois, une reproductrice pourra dans certains cas avoir deux portés mais en réalité on compte en « année de 16 mois » voir en « année de 20 mois ». C’est certes un détail mais cela a son importance vous le verrez plus loin.
Le planning d’une reproductrice peut se résumer en 5 étapes :
•La saillie
•La gestation
•La mise à bas
•L’éducation des chatons
•Le repos
C’est 5 étapes rythme la vie d’une reproductrice et de la chatterie. Que la reproductrice ai ou non des portés ; elle mange, défèque, dors comme tout les êtres vivant. Ce qui veut dire qu’avant même de commencer à parler de la reproduction, une femelle à un coût d’entretien.
Ce coût se décompose comme ceci :
•Alimentation (environ 150€/an)
•Litière et valorisation des déchets (environ 100€/an)
•Énergie (environ 25€/an)
•Soin et santé (environ 120€/an)
Chaque reproductrice nécessite un budget d’environ 400€/an minimum pour vivre dans de bonne condition. Cette enveloppe représente donc une charge que l’éleveur va devoir amortir sur la vente des chatons. Maintenant, abordons le cœur du sujet en décomposant les 5 étapes et leurs coûts. Le coût de l'achat des reproductrices de l'élevage est amorti sur la vente des chatons.
La saillie :
L’éleveur, pour garantir la qualité des futurs chatons est amené à faire une sélection des étalons disponible. Il peut être amené à devoir se déplacer avec sa reproductrice pour la faire saillir avec des étalons qui permettront d’apporter un pool génétique positif et une consanguinité minime mais cela se traduit par deux coûts :
•Les frais de déplacement
•Le coût de la saillie
•Les tests médicaux (Filv – Felv – Coronavirus - GM1/GM2 - etc...)
En fonction de la qualité de l’étalon le coût de la saillie peut varier du simple au double mais la moyenne constaté est de 100€/chaton né. En règle générale l’enveloppe allouée à la saillie est d’environ 1000€ qui sera ventilée sur la vente des chatons.
La gestation :
C’est l’étape la plus transparente de l’élevage, l’éleveur n’a pas de réel activité si ce n’est être attentif et interagir avec la reproductrice dans des rapports quotidiens comme avec n’importe quel autre animal de la chatterie.
La mise à bas :
Le deuxième travail le plus important de l’éleveur commence. Il s’agit de surveiller la mise bas et d’être prêt à tout moment 7j/7 24h/24 a intervenir. C’est le moment le plus critique dans la vie d’un élevage. Une césarienne peut parfois être nécessaire ou une intervention rapide du vétérinaire. A partir de ce moment, et pendant les trois prochain mois, l’éleveur mène une activité à plein temps, sans week-end, ni congés. Une enveloppe de 400€ est bloquée pour parer en cas de problème.
L’éducation des chatons :
Un chaton, ça dors, il faut donc des infrastructures adéquat pour qu’il dorme dans de bonne condition. Un chaton ça mange à partir du deuxième mois environ (environ 20€ de nourriture par chaton). Un chaton ca défèque (environ 7€ de litière par chaton).
Ensuite, un chaton nécessite des soins (vaccins, vermifuge, des jeux) pendant les 3 mois ou il sera présent dans la chatterie (soit environ 100€ par chaton).
A cela on doit ajouter l’émission du pédigrée, la mise en place d’une puce obligatoire d’identification (I-cad) et les écritures administratives d’enregistrement du chaton au LOOF (soit environ 100€ par chaton).
Viennent s’ajouter à cela les frais inhérent au fonctionnement et à la promotion de la chatterie (Site Internet, expositions, courrier administratif, achat d’infrastructures, consommable) soit environ 1000€/an
Le repos :
La reproductrice se repose avant sa prochaine portée, elle continue de manger, boire, déféquer, dormir…
Conclusion :
Un chaton a donc généré environ 1000€ de frais avant de vous êtes présenté en bonne santé, ayant toutes les caractéristiques de sa race ainsi qu’un lignage identifié. Et les 400 euros restant ?
Ils servent à payer l’éleveur pour ses trois mois d’activité intense !
Penchons nous sur un exemple concret une porté de 5 chatons va couter environs 5000 euros à l'élevage. La vente des chatons va générer 7000 euros de revenu brut. Au final l’éleveur aura 2000 euros brut pour 3 mois d’activité. Soit 666 euros brute par mois avant impôt. Le smic horaire brut au 1er juillet 2013 est de 9.45 euros. Pour rappel le salaire au smic sur une base de 35h semaine est de 1430.22 euros
L’éleveur va donc se payer 46% brute du SMIC pour une activité 24h/24 7j/7 !
Pour ces trois mois, pour se payer au SMIC et vivre de son élevage, l’éleveur devra avoir en théorie 3 portés simultanément de 5 chatons (3 reproductrices) et avoir en tout 12 reproductrices pour avoir 3 portés tout les trois mois (15 chatons) ce qui pose d’énorme problèmes sanitaires et génère des coûts bien plus important et surtout rend difficile le fait d’avoir des chatons bien socialisés. Ce genre d'élevage intensif est très rare, en effet au-delà des considérations pratiques, la cohabitation de 12 reproductrices nécessite des infrastructures lourdes qui ne sont pas en adéquation avec ce type d'élevage pour maintenir la qualité des chatons de compagnie.
Pour pouvoir se payer au smic, en gardant un élevage raisonné, l’éleveur devrait facturer au moins 1860 euros les chatons de la portée, à ce prix là il faudra de toute façon ajouter les 50 euros de stérilisation pour les chatons mâles et 105 euros pour les chatons femelles. Soit respectivement 1910 euros pour un mâle et 1965 euros pour une femelle !
Si j'ai fais le décompte précis ici, c'est bien pour montrer qu'il ne s'agit pas de faire du fric mais simplement de vivre a minima aussi grace à sa passion. Si on veux pouvoir vivre de sa passion, de son travail et de son investissement, on se rend vite compte que vendre 2000e un chatons n'est pas possible d'une part parce que certains bradent leur travail et d'autres part parce que dans la conjoncture actuelle, lacher 2000€ peu de gens sont pret à le faire ce qui rend la vente des chatons très difficile.
Alors il faut bien se rendre à l'évidence, que j'ai bien parlé d'un smic. Qu'avec un smic on ne roule pas sur l'or et qu'à moins de 2000€ l'éleveur n'est même pas payé comme un salarié ou un fonctionnaire.
Voilà la réalité de l'élevage en France mon ami !