gillesS(Gilgio) a écrit:Quel amour, en effet. Très certainement universel, on le sent dans le texte.
Je l'ai lu en entier il y a environ une heure, et j'ai eu besoin de le relire encore il y a quelques minutes, pas en entier cette fois, pour y retrouver quelques passages qui me restent en tête.
Les soins si attentionnés, le temps prodigue, puis le dernier moment, puis l'hommage si sensible...
Est-ce que Vodka commençait à remonter la pente quand la vétérinaire est venue? Je ne le sens pas comme ça.
Chaque stress physiologique est délétère pour les néphrons restants, et l'incontinence montrait à la fin qu'on était au bout du bout. Ce problème de la patte et des antibiotiques nécessaires aurait conduit à une dégradation certainement peu supportable, et à une fin à courte échéance de toute façon.
Vodka a eu un surplus inespéré de temps d'amour, elle en a bu tout ce qu'elle pouvait. La chatte que j'ai vue mourir du cancer cet été ne pouvait plus recevoir l'amour que je lui donnais et dont elle s'abreuvait: elle s'enfuyait à ma vue les derniers jours. Je n'ai pas pu la faire euthanasier quand il était encore temps. Vodka est partie quand elle pouvait encore boire: elle est partie abreuvée de ce sentiment. Elle a pu faire confiance jusqu'au bout: Espérance, vous n'avez pas failli par faiblesse (et cela, vous auriez pu vous le reprocher. )
La vétérinaire a forcément senti à quel point Vodka comptait pour vous et vos enfants. En professionnelle sensible, elle a voulu répondre sans le savoir au prénom que vous vous êtes choisie sur les forums, et vérifier que vous n'aviez pas besoin d'une perche pour revenir en arrière (vous le dites, d'ailleurs).
Elle s'est rassurée en vous disant qu'elle "sentait" que votre décision était prise.
C'est une chance de tomber sur une vétérinaire dotée d'une telle qualité humaine.
Ce qui vous trouble, c'est qu'à ce que vous sentiez comme juste s'ajoutaient des nécessités pratiques. Vous pensez qu'elles vous ont influencé.
Je pense qu'elles vous ont influencé, en effet, mais juste ce qu'il fallait pour vous préserver de l'absence de décision, comme un catalyseur insuffisant mais nécessaire.
Nous ne voulons pas vous consoler à tort ou par légèreté, mais je me joins aux autres avis: le moment que vous avez décidé était vraiment le bon, certainement pas trop tôt, mais pas trop tard non plus.
Moi aussi je vous remercie infiniment pour ce que ce récit m'apporte.
Je réponds à votre message mais cette réponse peut aussi aider toute personne qui aurait vécu ou vivrait ces situations.
Je suis sincèrement navrée que vous ayez eu à traverser cette épreuve avec votre chatte. Je crois que quelle que soit la décision que nous prenons il reste un goût amer car, nous nous demandons si nous n'aurions pas dû suivre l'autre chemin. Attendre un peu plus avec l'espoir d'une amélioration, parce que nous voulons leur donner un peu plus de temps de leur vie de chat. Ou engager le processus qui écourtera irrémédiablement cette petite vie et la relation que nous entretenons avec elle.
Peut-être que Vodka aurait remonté la pente mais je me dis que ça aurait été sûrement celle d'une petite bosse sur la route caillouteuse qu'était devenue sa vie. Les hauts et les bas quand ils se succèdent aussi rapidement deviennent éprouvants moralement. Vodka et moi avons vécu trois semaines de montagnes russes au début de cette aventure, et nous les avons vécues à nouveau à la fin. Nous n'avions plus les mêmes forces pour lutter.
Les frais vétérinaires sont un poids conséquent, et l'état, qui semble de toute façon avoir de moins en moins nos intérêts en tête, se goinfre avec une TVA de 20% sur chaque consultation, sur chaque soin, sur chaque produit, nécessaires à la survie d'un animal malade que nous aimons et tentons d'accompagner au mieux.
On pourrait me rétorquer qu'il est possible de contracter une mutuelle mais c'est une solution qui n'en ait pas une économiquement dans la plupart des situations, surtout quand on a plusieurs chats et qu'ils restent en appartement. Entre le coût de la mutuelle et celui des différents vaccins imposés par l'assureur tous les ans (après vérification ce n'est pas le cas pour tous), la franchise annuelle, et le taux de remboursement partiel... j'ai préféré mettre de côté pour faire face.
Dépenser plus pour Vodka si elle avait eu une maladie soignable pour lui donner plusieurs belles années sans subir une maladie grave aurait eu du sens. Dans le cas d'une maladie chronique où l'espérance de vie donnée est de quelques mois, des questions se posent inévitablement à un moment.
Reste que j'aurais aimé ne pas avoir le poids de cette équation alors que ma puce avait besoin de contrôles réguliers.
Mais je sais aussi que si j'ai pris cette décision d'annuler le rendez-vous du 29 décembre c'est parce que je voulais éviter ces voyages, ces manipulations, ces prises de sang, etc. Le fait qu'à la Grande Clinique ils emmènent les animaux dans une autre salle pour faire les examens a joué aussi sur ma décision. Lors du rendez-vous de contrôle du 23 décembre, j'ai demandé à ce que tout soit fait dans la salle de consultation et j'ai eu l'impression que ça les ennuyait. Pourquoi imposer à tous les animaux d'être séparés de leurs humains pour vivre ces examens ? Peut-être que certaines personnes préfèrent que ça soit ainsi, ce n'est pas mon cas. Surtout quand il s'agit d'animaux stressés par la présence d'étrangers. Et surtout également quand ils ont vécu des hospitalisations après avoir parcouru le même couloir.
Des "Et si" il y en a toujours à partir du moment où il faut choisir un chemin parmi plusieurs.
Il n'y en pas pour ce fameux jeudi où j'ai dû prendre la décision de laisser Vodka partir tant elle paraissait mal.
Mais je m'en pose d'autres à propos du parcours que j'ai choisi pour elle parce que je me suis laissée happer par la tendance qu'on a à se reposer sur des professionnels dans ces moments-là.
Quand j'ai constaté que sa patte était enflée, j'ai hésité. Où l'emmener ? Une petite voix, tenue, me soufflait que la vétérinaire homéopathe était la bonne option. Mais j'ai penché pour ceux qui avaient le dossier le plus complet sur l'historique médical de Vodka. Pour ceux qui feraient se succéder des visages de vétérinaires inconnus, ce qui ajoutera à mon désarroi.
Sa vétérinaire à la Grande Clinique était vraiment très bien. Et après toutes ces visites de contrôle, et ces mois de suivi, je m'étais imaginé que nous accompagnerions ma puce toutes les deux jusqu'au bout parce qu'elle était la mieux placée pour savoir le faire en choisissant les meilleures options et en sachant à quel point nous étions engagés pour les soins de Vodka.
Je rêvais d'un autre monde.
Comme je l'ai écrit dans mon hommage, j'ai beaucoup appris grâce à ma puce.
Mes chattes seront maintenant suivies dans une petite clinique où la valse de jeunes vétos n'existe pas.
Les maîtres des chats et des chiens n'ont pas seulement besoin de soins de qualité pour traverser du mieux possible les épreuves de problèmes de santé de leurs compagnons à poils, ils ont tout aussi besoin de relations humaines de qualité entre leur vétérinaire et eux mêmes. Ces relations de qualité sont difficiles à trouver dans les cliniques qui tournent comme des usines et où la vétérinaire habituelle n'est pas disponible avant un mois.
Je me suis sentie très seule à la fin dans la Grande Clinique en face de tous ces visages que je ne connaissais pas.
Je risque d'écrire encore quelques romans. C'est ce qui m'apaise le mieux, surtout les matins au réveil.
Les matins sont les plus difficiles.
Ils marquent le début d'une nouvelle journée sans la petite absente.