‘Jour d’exode’
C’était le 20 juillet 2012, jour du grand déménagement. Nous quittions un logement plutôt décent mais très bruyant pour une jolie maison à la campagne. Réglisse était avec nous depuis un peu plus d’un an, c’était une grande fille et ce premier foyer lui avait bien plu, elle y avait ses repères et ses petites habitudes. Je ne redoutais pas ce grand changement à venir pour elle, nos déménagements successifs avec Parnelle s’étaient tous plutôt bien passés, alors…
J’aurais pourtant dû être plus prévoyant pour que ça se passe au mieux. Le jour J, j’ai emmené ses affaires (litière, gamelles…) dans une petite cave sèche située au bout du long dressing où Réglisse se rendait souvent. Elle ne connaissait pas cet endroit dont la porte était toujours fermée et je n’ai pas eu la présence d’esprit de lui faire découvrir et explorer au préalable ni d’utiliser un peu de Feliway pour la préparer.
Ça a été en fait le seul moment vraiment désagréable pour elle. Je l’ai prise dans mes bras et amenée dans la pièce avant que nos déménageurs n’arrivent et là ça a été un peu la panique. Elle devait sentir la tension, l’agitation et de se retrouver dans cette pièce inconnue ne lui a pas plu du tout. Oh rien de terrible mais non seulement je voyais dans ses petits yeux ronds qu’elle avait peur mais elle essaya désespérément de sortir en tentant de passer par-dessus mon bras qui faisait barrage au moment où je fermais la porte. J’ai dû la repousser sans ménagement avec ma main pour pouvoir l’enfermer sans la blesser, ma pauvre petite belette
Elle a dû avoir bien peur et se sentir seule. Il y avait du monde et énormément de bruit : meubles qu’on pousse, qu’on démonte, coups de marteau. Très pris à gérer des tas de trucs, je ne suis allé la voir que deux ou trois fois au cours de cette longue journée : elle a failli me passer entre les jambes, gros flip car portes et fenêtres étaient ouvertes et la maison donnait sur une rue très passante et une autre fois, je l’ai trouvée prostrée et apeurée derrière un vieux volet en bois stocké dans cette petite cave. J’avais été voir comment elle allait parce qu’il y avait eu une bonne demi-heure de visseuse et de marteau.
De cet épisode désagréable, Réglisse aura gardé une certaine aversion et crainte pour les travaux et les messieurs ayant des grosses voix graves !
L’heure de la délivrance approchait. Elle a dû subir une dernière épreuve : se retrouver seule pendant une heure dans sa maison entièrement vide, sans son maître et sa maîtresse que j’emmenais au nouveau domicile. Impossible de prendre la minette sur le même voyage, épouse invalide, fauteuil roulant etc… à gérer…
Quand je suis revenu la chercher, elle se promenait près du séjour, elle s’est laissée mettre dans sa boîte de transport sans résistance, un bien grand mot car Réglisse a toujours été facile à transporter, des rouspétances et des pleurs mais jamais de crise ni d’agressivité. Mais là elle était hyper calme, on aurait dit qu’elle comprenait que c’était fini et qu’on n’allait pas chez le véto mais ailleurs.
Arrivé à la nouvelle maison, j’ai posé doucement la caisse dans le hall d’entrée. Pas de limitation pour l’accès, pas de Feliway, toute la maison (un étage, 130mé en tout) à sa disposition. Je suis encore ému en me rappelant comment elle a sans peur ni hésitation fait le tour complet des lieux, à la fois curieuse et excitée, grimpant sur les rebords des fenêtres pour contempler un monde qu’elle n’avait jamais vu ou imaginé : un jardin, la nature, les arbres. Ça lui a plu immédiatement.
J’étais content et le timing était parfait car à l’époque je commençais vraiment à faire mon deuil pour Parnelle. Je me disais ‘nouveau départ’, ‘nouvelle maison’ pour notre nouvelle mimine, elle en sera la reine. Elle l’a été, c’était SA maison, son royaume, elle s’y est trouvé cachettes, coins repos et aires de jeux sans parler de longs couloirs parfaits pour le sprint. Elle a eu droit à quelques sorties dans le jardin, du bonheur…
Elle a vécu 14 mois dans son petit paradis, elle devrait y être encore, elle aurait dû y vivre de longues et belles années. Hélas, je n’ai pas été fichu de la protéger et de la garder près de moi. Ma petite complice de jeux sans fin, ma petite panthère noire et ocre me manque horriblement…
Parnelle, ma princesse aux yeux verts. Je t'ai tant aimée, je t'aimerai toujours.
Réglisse, mon adorable petit criquet, je t'aime à tout jamais...